Nom de la participante : Carmen Espinosa

Carmen se tient debout, les mains dans les poches de son manteau et son col relevé contre son cou pour se protéger du froid mordant qui baigne le cimetière. Les yeux rivés sur le nom de sa mère gravé dans le marbre de la pierre tombale, la jeune femme ne réalise pas encore tout à fait qu'elle ne pourra plus jamais se blottir dans ses bras lorsqu'elle ne va pas bien. Une larme apparait au coin de son œil avant de s'aventurer sur sa joue qu'elle essuie d'un revers de main puis elle décide de quitter les lieux avant de geler sur place.

- Au revoir maman. Je t'aime.

D'un pas rapide et léger, elle se dirige vers sa vieille Jeep et s'installe au volant. Le moteur démarre sans peine et Carmen passe la première pour quitter le cimetière. Plutôt que de rentrer chez elle, la jolie latino bifurque vers la maison parentale pour aller rejoindre son père qui n'a toujours pas reprit le travail au centre de gestion. Sur le trajet, elle met la radio en marche et sélectionne une station qui diffuse de la musique en continu pour se changer les idées.

Arrivée chez son père, elle se gare comme d'habitude dans l'allée et saute de sa Jeep d'un bond léger avant de se diriger vers le porche où elle a passé tant d'heures avec sa mère. Sans même frapper, elle entre dans la maison et entend son père en train de discuter au téléphone dans la cuisine. Pour ne pas le déranger, elle ne dit pas un mot et accroche sa veste dans l'entrée avant de se déchausser. En se dirigeant vers la cuisine, elle écoute la conversation de son père.

- Je sais bien.
...
- Ne laisse personne s'en occuper, c'est à moi de gérer ça.
...
- Je sais que je ne peux pas pour l'instant.
...
- Dès que j'ai récupéré la mobilité de mon bras, je vais me les faire ces enculés.

Carmen est intriguée, elle n'a jamais entendu son père parler sur ce ton à qui que ce soit et encore moins en utilisant ce genre de vocabulaire. A l'entrée de la cuisine, elle s'arrête soudain en voyant son père qui lui tourne le dos mais, surtout, en voyant le fusil à lunette posé sur son bipied au milieu de la table de la cuisine. Elle reconnait au premier coup d’œil ce fusil pour l'avoir utilisé plus d'une fois au stand de tir de Black Mountain.

- Je sais qui ils sont et où les trouver.
...
- Personne ne les bute, c'est à moi de leur régler leur compte. Dès que mon bras ne tremblera plus, je m'en occupe.

Un verre d'eau en main et le téléphone calé entre l'épaule et l'oreille, Alonso Espinosa se retourne et tombe nez à nez avec sa fille. Passé l'instant de surprise, il expédie son correspondant et pose son téléphone à coté de son verre d'eau en compagnie du fusil à lunette.

- Bonjour chérie.

Carmen ne sait pas comment réagir et reste inerte, regardant son père sans comprendre. Elle tente bien de recoller les morceaux du puzzle dans sa tête mais ce qu'elle vient d'entendre ne colle pas avec l'image qu'elle a de son paternel.

- Ca va ? Tu es là depuis longtemps.
- Depuis assez longtemps pour avoir entendu une partie de ta conversation.
- Ah... Assied toi.

La jeune femme jette un regard au fusil qui trône sur la table mais aucune peur ne se lit dans son regard. Ce n'est qu'un sentiment d’incompréhension qui la domine pour l'instant alors qu'elle pose son derrière sur une des chaises de la cuisine. Son père enlève le fusil de la table et le pose dans un angle de la pièce avant de s'assoir en face de sa fille.

- J'ai peur de comprendre, tu parlais de quoi, papa ?
- De venger ta mère.
- Tu parles de tuer des hommes ?!

La réponse arrive, cinglante, et sans appel.

- Oui. La justice ne fera rien, alors je vais prendre les choses en main.
- Mais papa.
- Il faut que je te parle de quelque chose, ta mère était au courant.

Alonso cherche ses mots pour ne pas heurter sa fille, il vient de perdre sa femme et ne veut pas que Carmen lui tourne le dos.

- Je ne suis pas que le gestionnaire du centre pour mon entreprise. J'ai déjà éliminé des personnes pour mes employeurs.
- Une sorte de tueur à gages ?
- On peut voir ça comme ça.
- Combien ? ... Je veux dire combien tu en as tué ?
- La question n'est pas là. Je n'ai jamais éliminé un innocent, c'étaient tous des criminels.
- Depuis combien de temps tu fais ça ?
- Depuis Houston.
- Vous m'avez mentit toutes ces années ?
- Pour te protéger.
- C'est toi qui était visé au restaurant ?
- Non, c'est mon patron.
- Tu vas faire quoi maintenant ?
- Eliminer les deux tireurs. Ca ne ramènera pas ta mère mais ça lui rendra justice.
- Comment tu vas faire avec ton bras qui tremble dès que tu t'en sert ?
- Je vais attendre de récupérer.

Un silence lourd et pénible s'installe entre le père et la fille et c'est finalement Carmen qui rompt le silence en sidérant son père.

- On va le faire tous les deux.
- Quoi ? Non ! Je ne veux pas te mêler à ça.
- Ce sont les tireurs qui m'ont mêlée à ça et puis, on fait quoi si tu ne récupère pas complètement ton bras ? On les laisse s'en tirer ?
- Non Carmen.
- Et puis, je te rappelle que je tire mieux que toi avec ce fusil.

L'argument fait mouche, c'est vrai que la jeune femme fait régulièrement de meilleur scores que son père sur du tir à distance mais il sait très bien que la différence entre du tir sur cible et du tir anti personnel est énorme.

- Allumer une cible en carton et un homme sont deux choses très différentes.
- Je m'en doute mais pour les tueurs de maman, je devrais pouvoir gérer.
- Si tu veux m'aider, reste en dehors de ça. Je ne te laisserais pas tuer quelqu'un de sang froid.
- Je ne serais pas toute seule, on le fera ensemble. Pour venger maman.
- Tu es sûre de toi ?
- Aussi sûre que je puisse l'être.

Alonso attrape son verre d'eau et en vide le contenu d'une traite pour s'humidifier la gorge. Il n'aime pas ce qu'il s'apprête à dire mais il a reconnu cette lueur dans le regard de sa fille. Il sait trop bien qu'elle a prit sa décision et qu'elle ne le lâchera pas tant qu'elle n'aura pas obtenu gain de cause.

- D'accord, mais tu ne prends aucune initiative.
- C'est toi la tête, moi je ne m'occupe que de l'exécution de la question.
- On les aura un par un.
- D'accord.

La jeune photographe insouciante est en train de prendre un chemin dangereux mais elle n'a aucune peur, son père est là pour la protéger comme elle le protègera aussi en cas de besoin.

Bonjour Carmen,

Je suis intriguée par la tournure que prend l'histoire de ton personnage. J'ai hâte d'en lire plus.

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