Nom de la participante : Carmen Espinosa
Carmen quitte son garage avec sa Jeep et appuie sur la télécommande pour fermer la porte avant de s'engager dans la rue en direction de la maison de son père. Pour une fois, elle a laissé son équipement photo à son loft, ce n'est pas de la photo qu'elle va faire aujourd'hui mais de l'entrainement au tir dans un coin désolé avec son père. Malgré le programme de la journée, la jeune femme affiche une sérénité déconcertante alors qu'elle conduit son 4x4 et s'engage en marche arrière dans l'allée de la maison parentale. En descendant de sa Jeep, elle salue la voisine qui est sortie pour relever son courrier.
- Bonjour madame Wallace.
- Bonjour Carmen.
Sans frapper à la porte, elle entre dans la maison et embrasse son père.
- Salut papa.
- Bonjour ma chérie. Tu es prête ?
- Autant que possible.
- Si tu as le moindre doute, on arrête tout. C'est toi qui choisi.
- Papa... on en a déjà parlé. Je veux le faire et avec toi comme spotter, je sais que j'y arriverais.
- D'accord, alors on y va.
Carmen attrape la mallette du fusil sur la table, ainsi que le sac contenant un monoculaire et des munitions, puis fait signe à son père pour y aller. Alors qu'elle range le matériel à l'arrière de la Jeep, Alonso verrouille la porte de la maison, puis le père et la fille montent à bord du tout-terrain. Carmen prend le volant et conduit en suivant les indications de son père jusqu'à un coin perdu de Black Mountain. En descendant de la Jeep, Carmen regarde autour d'elle en s'adressant à son père.
- Le coin est chouette, t'es venu ici souvent ?
- A chaque fois que j'ai besoin d'entrainement à très longue distance. Les roches là-bas sont à presque un kilomètre.
- Je vois... Bon, on s'y met ?
Sans attendre de réponse de la part de son père, elle ouvre le hayon de sa Jeep et sort le fusil avant de l'approvisionner. Une fois le fusil prêt, elle déplie le bipied, le pose sur le capot de sa Jeep et enfile ses bouchons d'oreille avant de poser son œil en face de la lunette.
- Carmen, pas ici.
- Pardon ?
La jeune femme relève la tête en direction de son père avec l'air étonné.
- Tu comptes laisser des traces de poudre sur ton capot ? C'est pas malin.
- C'est vrai. Merci.
Carmen se rend bien compte qu'être habile au tir ne fait pas un bon tueur. Jamais elle n'aurait pensé à éviter de laisser des traces de résidus de tir sur le capot de sa Jeep. Dommage, elle était à bonne hauteur. La jeune femme récupère le fusil et va poser le bipied sur un arbre mort couché alors que son père la rejoint avec le monoculaire.
- T'es prête ?
- Je suis à tes ordres, donne moi la cible.
- Tu vois la souche coupée en biais ?
- Avec la fougère à droite ?
- C'est ça. Tu as une pierre juste au dessus, tu me mets une balle dedans.
- J'attends tes indications.
Sans un mot, Carmen suit les indications de son père pour régler sa lunette et garde bien en tête qu'un tir à cette distance là est une nouveauté pour elle.
- Dès que tu le sens.
Elle entend le feu vert, inspire à fond pour gonfler ses poumons et bloque sa respiration alors que son doigt glisse doucement vers la queue de détente. Lorsqu'elle fait feu, son père veille l'impact avec le monoculaire et lui fait un rapport sur le tir.
- Un clic à gauche.
Carmen tourne la mollette suivant les consignes d'Alonso et prépare à nouveau son tir.
- Encore un à gauche. Le vent forcit.
Elle compense à un clic de plus et gonfle à nouveau ses poumons avant de bloquer sa respiration et de presser doucement la queue de détente. Cette fois, elle fait mouche et sa balle frappe légèrement à gauche du centre de la pierre.
- Joli tir. Mais en situation, tu n'auras pas le droit à l'erreur.
- Donne moi la distance.
- D'après le télémètre, 880 mètres.
- Trouve moi une cible. On a besoin d'entrainement tous les deux. Tes indications n'étaient pas bonnes sur mon premier tir.
- Pas plus de deux balles sur chaque nouvelle cible.
- J'attends tes indications.
Pendant une heure, ils changent de cible tous les deux tirs, variant les élévations et les distances. La précision des tirs s'améliore régulièrement jusqu'à ce que Carmen rate quatre tirs de suite.
- On va arrêter, tu fatigues.
- Non, ça va.
- C'est l'heure du debriefing, tu viens de me rater quatre tirs faciles.
- Ok, c'est toi qui décides.
Alors qu'elle se redresse, elle s'étire pour détendre ses épaules endolories et enlève ses protection auriculaires. C'est l'heure d'arrêter, Alonso a raison et sa fille le sait très bien.
- Tu ranges le fusil ?
- Je m'en occupe.
Laissant son père ranger le matériel, elle contemple la vue en gardant les bras croisés. La question qui lui tourne en rond dans la tête est de savoir si le moment venu elle sera capable de presser la détente pour ôter la vie à un homme, même si cet homme est une crapule responsable de la mort de sa mère.
- Carmen ?
- J'arrive !
Après un dernier regard à la nature, elle rejoint son père à la Jeep et prends la direction de la ville en discutant avec Alonso en évitant de parler de leur séance de tir.